par
Vincent Hugeux
La visite en France de Seif al-Islam,
fils du Guide de la révolution, témoigne du souci
de Tripoli de normaliser ses relations avec l'Occident
Son prénom signifie «Glaive de l'islam».
A 30 ans à peine, Seif al-Islam Kadhafi, fils premier-né
du second mariage du Guide de la révolution libyenne,
parfait son apprentissage de bretteur. Mais son séjour
en France, du 25 février au 2 mars, enrichit aussi l'offensive
de charme d'un pays paria en quête de respectabilité
ou d'investissements, et qui fête le quart de siècle
de la Jamahiriya - l'Etat des masses - «arabe, populaire
et socialiste». Escorté par une suite pléthorique,
cornaqué par le cousin Ahmad Kadhaf al-Dam, naguère
chef des services de renseignement de Tripoli, l'hôte
eut droit lors de cette «visite privée» aux
égards dus à un dauphin prometteur. «Il
a de l'avenir, de l'influence et les faveurs de son père»,
avance un éminent orientaliste du Quai d'Orsay. De fait,
Seif al-Islam, noceur assagi, insiste trop sur son absence de
mandat officiel pour qu'on le croie tout à fait. Qu'il
s'agisse du Proche-Orient, du naufrage de l'idéal panarabe
ou de l'Union africaine - vieux dada paternel - ses thèses
font écho, sur un registre policé, aux imprécations
du «bouillant colonel». La Fondation internationale
Kadhafi de bienfaisance, qu'il préside, joua un rôle
décisif dans la libération des otages occidentaux
détenus à Jolo par les rebelles islamistes philippins.
De même, l'héritier a négocié au
Pakistan le rapatriement de 40 moudjahidine libyens arrêtés
en Afghanistan. Et il propose aux maîtres de Kaboul d'accueillir
sur le rivage des Syrtes les soldats perdus d'Al-Qaeda.
L'escapade parisienne aura eu, pour lui, une saveur de revanche:
désireux de poursuivre, fût-ce de loin, ses études
dans l'Hexagone, Seif sollicita en vain un visa. Voilà
comment, flanqué d'un couple de tigres du Bengale, l'éconduit
débarque un jour à Vienne et se lie avec le populiste
autrichien Jörg Haider, autre réprouvé. A
l'en croire, du sang arabe coule d'ailleurs dans les veines
du bellâtre xénophobe; lequel envisagerait d'embrasser
l'islam... Epris de business, «le Glaive» goûte
aussi l'art pictural. L'Institut du monde arabe (IMA) présente
ces jours-ci ses tableaux, à la faveur d'une exposition
parrainée par une dizaine de groupes pétroliers
engagés en Libye. Un hommage avisé à la
peinture à l'huile?