victimes attentat

victimes attentat
(Dimanche 20 octobre 2002)
La Libye est disposée à mieux indemniser les familles des victimes de l'attentat contre le DC-10 d'UTA
La visite de Dominique de Villepin à Tripoli se solde par un progrès sensible sur cette affaire placée en travers de la normalisation des relations avec la France .

UNE VISITE ÉCLAIR à Tripoli du ministre français des affaires étrangères, Dominique de Villepin, vendredi 18 octobre, a fait progresser « les suites » de l'affaire du DC-10 d'UTA qui avait été la cible d'un attentat en septembre 1989 au-dessus du désert du Niger. La Libye est prête à « envisager une indemnisation des victimes françaises qui n’auraient pas été indemnisées » et à « des indemnisations supplémentaires dès qu’elles seraient décidées par la justice française », rapporte l’Agence France-Presse, citant des sources diplomatiques françaises dans la capitale libyenne. A ce jour, la Libye s’était contentée de transférer à la France, en juillet 1999, la somme de 210 millions de dollars (presque autant en euros), destinée à indemniser les ayants droit des 170 victimes de cet attentat - qui ne sont pas toutes françaises. Ce transfert équivalait à la reconnaissance de la responsabilité de ressortissants libyens dans cet attentat. De fait, quatre mois plus tôt, six hauts responsables des services secrets ou de la diplomatie libyenne, dont le beau-frère du colonel Mouammar Kadhafi, Abdallah Senoussi, avaient été condamnés par contumace par la cour d’assises de Paris à la réclusion à perpétuité. Mais, comme le rappelaient les familles des victimes à la veille de la visite de M. de Villepin en Libye, cette décision « n’a pas été exécutée » et les condamnés sont toujours en liberté en Libye. M. de Villepin a insisté auprès de son interlocuteur sur « l’importance des décisions de justice françaises » et sur les demandes d’indemnisation supplémentaire des familles des victimes,

qui veulent être dédommagées à égalité avec les victimes américaines et britanniques d’un autre attentat qui, en décembre 1988, avait visé un Boing de la PanAM au-dessus de Lockerbie, en Ecosse. Après la condamnation à la perpétuité d’un ressortissant libyen par un tribunal écossais, la Libye a promis 10 millions de dollars aux familles de chacune des 270 victimes de cet attentat.
Mais à Washington, se fondant sur un amendement de 1996 relatif à l’immunité de souverains étrangers et qui autorise des procès contre « les Etats étrangers ayant commis ou aidé à commettre des actes terroristes à l’origine de (…) la mort de citoyens américains », sept familles de victimes américaine de l’attentat du DC-10 ont introduit une action en justice devant un tribunal fédéral. Elles réclament 3 milliards de dollars de dommages et intérêts à la Libye et au colonel Kadhafi. La plainte est étayée par un dossier de 35 000 pages de l’enquête judiciaire français, transmis par l’association SOS-Attentats.


INDIGNATION
En juin 1999, SOS-Attentats et la sœur de l’une des victimes françaises avaient déposé une plainte contre le colonel Mouammar Kadhafi lui-même pour « complicité, par instructions données » dans l’attentat. Mais la Cour de cassation avait rejeté ces poursuites, conformément à la « coutume internationale qui s’oppose à ce que les chefs d’Etat en exercice puissent faire l’objet de poursuites devant des juridictions pénales à l’étranger ».

Avant la visite de M. de Villepin à Tripoli, les familles des victimes françaises de l’attentat contre le DC-10 d’UTA se disaient « choquées et indignées » par la normalisation des relations avec Tripoli et par la visite prévue lundi 21 et mardi 22 octobre à Paris de M. Chalgham, qui doit coprésider avec son homologue français la commission franco-libyenne. La réunion ce cette commission est le point d’orgue d’une normalisation qui se fait plutôt lentement. Un premier pas avait été fait en mai 2000, lorsque le secrétaire d’Etat à l’industrie, Christian Pierret, s’était rendu à Tripoli. C’est la première visite d’un ministre français dans la capitale libyenne depuis 1992, date à laquelle le Conseil de sécurité de l’ONU avait imposé des sanctions à la Libye pour la forcer à coopérer dans l’enquête sur les deux attentats. La visite de M. Pierret était consécutive à la suspension des ces sanctions, Tripoli ayant enfin rempli ses obligations.
Un an et demi plus tard, c’était au tour du ministre délégué à la coopération et la francophonie, Charles Josselin, de faire le déplacement de Tripoli, où il avait essentiellement discuté avec ses hôtes de lutte contre le terrorisme depuis les attentats du 11 septembre –fermement condamnés par la Libye.

par MOUNA NAIM

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