victimes attentat

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(Mardi 21 janvier 2003)

La Libye fait main basse sur les droits de l'homme à l'ONU

Tollé après l'élection de Tripoli à la tête de la commission.
Par Philippe GRANGEREAU
mardi 21 janvier 2003
C''est un peu comme si un mafioso faisait main basse sur la Cour suprême. La Libye, l'un des pays les moins recommandables du monde, a été élue hier à la présidence de la Commission des droits de l'homme des Nations unies. Une élection en forme de coup de grâce pour cette institution bureaucratique qui avait déjà perdu beaucoup de sa crédibilité ces dernières années en se montrant de plus en plus réticente à condamner fermement les violations de certains pays.
Indignation. Najat Al-Hajjaji, ambassadrice de Libye auprès de l'ONU à Genève, a été élue par 33 voix sur 53. La Libye a sans doute pu compter sur les voix de Cuba, du Soudan et de l'Algérie. Trois Etats de la Commission ont voté contre (Etats-Unis, Canada et Guatemala), et dix-sept se sont abstenus, parmi lesquels, vraisemblablement, les sept pays de l'Union européenne membres de la Commission, dont la France. Les familles des 170 victimes de l'attentat libyen contre le DC 10 d'UTA (en 1989) se disent «indignées» par le soutien apporté par la France, qui a été remerciée nommément par le ministère des Affaires étrangères libyen alors qu'il rendait hommage, hier, aux pays «amis» qui avaient «refusé les pressions».
Contrairement à la tradition depuis quarante-six ans, selon laquelle le président était désigné par acclamation, il a été procédé à un vote à bulletin secret, à la demande des Etats-Unis qui comptaient ainsi s'opposer au choix de la Libye. La candidature de Tripoli avait été proposée par le groupe des pays africains, à qui il revenait cette année de le faire.
Prisonniers politiques. «C'est une victoire éclatante», a aussitôt triomphé le gouvernement libyen, que le rapport 2002 d'Amnesty International fustigeait de long en large. Les prisonniers politiques se comptent par centaines et beaucoup ont été incarcérés sans inculpation ni jugement. Le «contexte» libyen est tout aussi édifiant : la liberté d'expression est strictement limitée, la législation interdit la formation de partis politiques ainsi que toute critique du régime. Des faits que le porte-parole du ministère libyen des Affaires étrangères, Hassouna al-Chaouch, a absous hier d'un trait en déclarant que l'élection de son pays représente une «reconnaissance mondiale historique du dossier vierge de la Libye dans le domaine des droits de l'homme».
Le haut commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, le Brésilien Sergio Vieira de Mello, soutient la demande de militants qui proposent qu'un pays remplisse un certain nombre de critères pour pouvoir siéger à la Commission. Les membres pourraient ainsi être obligés de signer et ratifier tous les traités et conventions relatifs aux droits de l'homme et accepter la possibilité pour les enquêteurs de l'ONU de se rendre dans le pays.
avec AFP, Reuters
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