Vendredi
6 juin, 6 h30
publié sur le site internet http://www.mwinda.org
http://www.mwinda.org/article_nouv-site/uta.html
Les " Familles de l'attentat du DC10 UTA en colère
! " se mobilisent depuis plusieurs jours avec succès
pour montrer aux autorités libyennes leur détermination
à obtenir justice. Elles ont engagé de nouvelles
actions dès le lundi 2 juin 2003.
Lundi 26, mardi 27 et jeudi 29 mai les membres des " Familles
de l'attentat du DC10 d'UTA en colère ! " se sont
relayées pour manifester devant les comptoirs d'embarquement
des vols vers Tripoli des compagnies aériennes libyennes
Libyan Arab Airlines et Afriqiyah Airways, à Orly comme
à Roissy.
A chaque opération, une dizaine de membres du collectif
ont déployé entre les files d’enregistrement
du vol une banderole de 10 m de long comportant les noms, âges
et nationalités des 170 passagers et membres d’équipage
tués dans l’attentat du DC10 UTA, le 19 septembre
1989 et distribué des tracts auprès de nombreux
passagers de toutes nationalités. D’autres rendez-vous
ont eu lieu le lundi 2 juin 2003 à l'ambassade de Libye
et le mardi 3 juin au Consulat de Libye.
" Mwinda " s'est entretenu avec M. Guillaume Denoix
de Saint Marc, porte-parole des familles, qui a lui-même
perdu son père dans l'attentat. On rappelle qu'une soixantaine
de Congolais ont également péri suite à cet
acte terroriste.
D'abord pourriez-vous
nous dire le sens de votre combat, rappeler à nos lecteurs
ce qu'est " l'attentat du DC 10 d'UTA " ?
Le 19 septembre 1989, un avion français, le DC10 de
la compagnie UTA qui effectuait le vol UT772 Brazzaville-Paris,
a explosé en vol au-dessus du désert du Ténéré,
après son escale à N'Djamena. A bord, il y avait
170 passagers et membres d'équipage, de 17 nationalités.
Il y avait beaucoup d'enfants à bord, du fait de la rentrée
scolaire et universitaire très proche.
L’opération d’information du public
devant les guichets de la compagnie aérienne libyenne est
à l’évidence un succès.
En effet, grâce à ces actions, nous avons pu
sensibiliser différentes populations. D'une part, et c'est
notre première cible, les Libyens qui prenaient les vols
ou le personnel de la compagnie aérienne. Ce qui est intéressant,
c'est que des personnalités politiques ou administratives
libyennes prenaient ces vols. Elles ont ainsi pu constater notre
motivation. Vous savez, ce n'est pas si facile pour nous d'aller
au devant des représentants d'un État qui a lâchement
tué nos proches. Nous sommes restés très
calmes, malgré les provocations ou les tentatives de déstabilisation.
Quelques passagers libyens nous ont exprimé leur compassion
et nous ont présenté des excuses pour ce que leur
pays avait fait. Ces réactions nous ont beaucoup touché.
Des provocations ?
A un moment, une personne a voulu prendre les autres passagers
à partie pour nous traiter de menteurs, a commencé
à nous insulter. Nous avons essayé de discuter avec
lui, mais devant l'impossibilité de tout dialogue, nous
avons décidé de ne pas répliquer, et de rester
calme. Les forces de l'ordre sont intervenues du fait des cris
de la personne. Puis la tension est retombée d'elle-même.
Notre calme et notre dignité n'ont pas permis au provocateur
d'obtenir le succès escompté. Par ailleurs, à
d'autres moments des représentants libyens ont engagé
des discussions visant à disculper leur État, ou
à nous décourager. Mais nous ne nous sommes pas
laissés impressionner. Treize ans de lutte ont fini par
nous donner de la détermination et de la force.
Vous souhaitez sensibiliser les passagers voyageant vers Tripoli
sur la nature du régime libyen.
Qu’attendez-vous de cette action ?
J'en viens à la deuxième cible : les passagers
" normaux ". Le but est de rappeler que la Libye n'est
pas un État comme les autres. Cet État a un passé
terroriste, même si tout est fait pour le faire oublier.
Nous avons eu de nombreux témoignages de sympathie de la
part des passagers. Cet attentat est encore très présent
dans la mémoire collective des Africains ou de ceux qui
voyagent en Afrique. Certains des passagers connaissaient des
victimes de l'attentat.
Considérez-vous qu’il y a deux poids deux mesures
par rapport à une affaire similaire, à savoir l’attentat
de Lockerbie ? Si oui, quelle en serait la raison ?
La disproportion entre les deux affaires est criante ! Dans
le cas de Lockerbie, les inculpés ont été
extradés, il y a eu un procès avec les accusés
dans le box, les condamnés exécutent leur peine,
l'acte a été reconnu civilement par la Libye et
chaque famille va recevoir 10 millions de dollars. Dans le cas
du DC 10, il n'y a pas eu d'extradition, le procès était
par contumace, en l'absence des accusés, les 6 condamnés
sont toujours en liberté (dont Senoussi, le beau-frère
du colonel Kadhafi qui a même été nommé
chef de la Sécurité), l'acte de terrorisme n'a pas
été reconnu, et certains ayant droit (pas tous)
ont reçu une aumône : entre 3 000 et 30 000 euros.
La diplomatie française a, il y a peu, renoué
avec la Libye. Auparavant M. Dumas, alors ministre des Affaires
étrangères, parlait de la nécessité
de « tourner la page ». Cela avait choqué les
familles des victimes...
Nous avions bien sûr été très choqués.
Concernant Roland Dumas, c'est aux familles elles-mêmes
qu'il avait dit ça ! C'était la preuve que l'affaire
serait étouffée. Le couvercle de la raison d'État
était tombé. Heureusement, nous n'avons pas laissé
faire et la recherche de la vérité, puis celle de
la justice a commencé. Nous sommes intervenus lors de la
reprise des relations franco-libyennes, et suivons ça de
très près. Il semblerait que la diplomatie française
ait enfin entendu notre colère, et qu'elle conditionne
la normalisation des relations à la prise en compte par
la Libye de nos revendications. Notre groupe représente
des ressortissants de 17 pays, et la France n'est donc pas le
seul pays concerné. C'est pourtant la France qui a été
visée par cet attentat, c'est donc à elle de défendre
les familles des 170 victimes, de 17 nationalités. C'est
au nom de la France que les membres de nos familles ont été
tués.
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