Selon des responsables
américains, la France serait prête à mettre
son veto à une levée de ces sanctions imposées
depuis 1992 contre Tripoli si une majoration de ces indemnisations
n'était pas conclue. Et un responsable américain
a dénoncé un "chantage" de Paris dans
cette affaire.A Paris, les responsables se sont gardés
de préciser jusqu'où pourrait aller la France mais
le ministère des Affaires étrangères a rappelé
jeudi qu'une solution à cette question était "une
condition indispensable à la levée définitive
des sanctions contre la Libye".
La levée des sanctions pourrait être envisagée
rapidement au Conseil de sécurité des Nations unies
après la conclusion d'un accord entre la Libye et les avocats
des ayants droit des familles des victimes d'un autre attentat,
celui de Lockerbie, le 21 décembre 1988. L'explosion d'un
Boeing de la Panam, au-dessus du village écossais de Lockerbie,
avait fait 270 victimes.
Aux termes de cet accord, 2,7 milliards de dollars au total seraient
versés aux parents des victimes de manière échelonnée.
Quatre millions de dollars seraient versés à chaque
famille de victimes de l'attentat à la levée des
sanctions de l'ONU, quatre millions supplémentaires à
la levée des sanctions américaines et encore deux
millions quand la Libye ne figurera plus sur la liste américaine
des Etats soutenant le terrorisme.
En regard, le règlement de l'attentat du 19 septembre
1989 contre un appareil de la compagnie française UTA,
qui reliait Brazzaville à Paris et a explosé au-dessus
du Niger, faisant 170 morts, apparaît déséquilibré.
En 1999, six Libyens avaient été condamnés
par contumace par un tribunal parisien et la Libye s'était
engagée à payer 35 millions de dollars aux familles
des victimes, soit entre 3.000 et 30.000 euros par partie civile,
au nombre de 313.
Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères,
Hervé Ladsous, avait souhaité récemment que
"les indemnités versées dans l'affaire UTA
soient jugées en équité par rapport aux compensations
que recevront les ayants droit des victimes de Lockerbie".
Cette question a été soulevée par le ministre
des Affaires étrangères Dominique de Villepin avec
ses homologues libyen, américain et britannique dans des
conversations téléphoniques mardi et mercredi.
Mais des responsables américains ont considéré
que l'insistance de la France relevait du "chantage".
"Le chantage est un mot affreux mais c'est ce que les Français
sont en train de faire", a estimé un responsable,
sous couvert de l'anonymat. "Ils tiennent l'accord sur Lockerbie
en otage", a-t-il ajouté.
Paris apparaît déterminé à gagner du
temps dans la mesure où des progrès semblent avoir
été réalisés avec la Libye.
Le collectif des familles des victimes de l'attentat contre le
vol UTA est en négociation directe avec Tripoli pour obtenir
une revalorisation des indemnisations, selon son porte-parole
Guillaume de Saint-Marc. "On cherche à obtenir un
document conjoint qui donne un chiffre ou, à défaut,
une fourchette", avec une somme "comparable à
celle de Lockerbie, déduction faite des taxes et des frais
d'avocats, puisque nous sommes en négociation directe",
a précisé M. de Saint-Marc. |