RABAT/PARIS (Reuters) - Jacques
Chirac a adressé samedi une ferme mise en garde à
la Libye, soulignant que le non-respect des engagements pris dans
le dossier du DC-10 d'UTA exposerait Tripoli à "des
conséquences", décidées "sans agressivité"
mais "sans faiblesse".
Le délai fixé pour un accord d'indemnisation par
le régime libyen des familles des 170 victimes de l'attentat
contre le DC-10 d'UTA en 1989 au dessus du Niger expire ce samedi
à minuit.
"Je veux croire que ces engagements seront tenus. Si d'aventure,
ils ne l'étaient pas, cela ne pourrait pas ne pas avoir
de conséquences sur les relations entre nos deux pays",
a dit le président français lors d'une conférence
de presse, au terme de sa visite d'Etat au Maroc.
"Nous observons la situation, et nous en tirerons les conclusions
qui s'imposent sans agressivité et sans faiblesse",
a-t-il souligné.
"C'est ce soir l'échéance, je ne veux donc
pas préjuger des choses", a précisé
Jacques Chirac.
La date-limite du 11 octobre figure formellement dans l'accord
de principe sur une indemnisation intervenu le 11 septembre entre
les associations des familles et la Fondation Kadhafi, présidée
par un des fils du dirigeant libyen, Seïf el-Islam.
Interrogé samedi par Reuters, le porte-parole du collectif
des familles, Guillaume Denoix de Saint-Marc, dont le père
a trouvé la mort dans l'attentat, a indiqué qu'il
n'y avait "aucun élément nouveau".
"Les derniers contacts productifs datent du 19 septembre",
a-t-il ajouté, faisant référence à
la venue à Paris d'un négociateur libyen.
"Nous avons proposé un calendrier aux Libyens et
nous n'avons reçu aucune réponse", a-t-il dit
en estimant que ce délai imprévu était sans
doute dû à des conflits politiques internes en Libye.
Il a ajouté qu'en cas d'échec les familles des
victimes procèderaient à de nouvelles "actions"
pour se faire entendre des Libyens.
"PRESSIONS DIPLOMATIQUES ET ÉCONOMIQUES"
L'association SOS-Attentats, qui représente aussi des
familles de victimes, a fait savoir de son côté vendredi
qu'en cas d'échec samedi soir elle demandera au gouvernement
français, "qui a cautionné l'accord de principe,
d'exercer tous les moyens de pression diplomatiques et économiques
pour obtenir satisfaction".
Le Quai d'Orsay avait fait savoir mercredi dernier qu'il restait
"très attentif" au respect des dispositions convenues
entre les familles et la fondation Kadhafi.
Selon SOS-Attentats, les familles ont rejeté une proposition
d'indemnisation d'un million de dollars par victime.
"L'accord du mois dernier fait état d'une somme juste
et équitable. Nous attendons toujours une nouvelle offre
de Tripoli", a précisé cette semaine à
Reuters une porte-parole de l'organisme.
Dans le dossier du Boeing de la Panam, qui a explosé au-dessus
de Lockerbie, en Ecosse, la Libye a accepté en août
de verser 2,7 milliards de dollars aux familles des 270 victimes
de l'attentat de 1988.
Certains proches des victimes du vol UTA ont touché de
3.000 à 30.000 euros au terme d'un procès en 1999
à Paris mais une partie des familles n'a jamais été
indemnisée.
Une interview du président de Seïf al-Islam Kadhafi,
publiée quelques jours après l'accord du 11 septembre,
a semé le trouble chez les familles des victimes du DC-10.
Le fils de Mouammar Kadhafi demandait notamment que soit trouvée
une "solution" pour les six Libyens condamnés
par contumace en 1999 et évoquait, en vue de l'indemnisation
des familles, la création d'un fonds spécial auquel
participeraient des entreprises françaises implantées
en Libye.
La signature de l'accord de principe entre les familles du DC-10
et la fondation Kadhafi a permis la levée définitive
des sanctions prises par les Nations unies à l'encontre
de la Libye après l'attentat de Lockerbie.
Paris avait menacé d'utiliser son veto lors de ce vote
si un accord d'indemnisation "juste et équitable"
n'était pas trouvé avec les familles du DC-10.
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