TRIPOLI (AFP) - La Libye "suspend"
ses négociations avec les familles des victimes de l'attentat
contre le DC-10 d'UTA, a déclaré le chef de la délégation
libyenne à Paris, Salah Abdel Salam, joint par téléphone
mardi soir à partir de Tripoli.
"Nos doutes se sont avérés" à
propos des intentions du gouvernement français "après
que le ministère des Affaires étrangères
français eut essayé de se soustraire à l'accord"
conclu le 11 septembre sur l'indemnisation des familles des victimes
de l'attentat, a déclaré M. Abdel Salam.
"Par conséquent, nous ne poursuivrons pas les négociations,
elles ont été suspendues", a-t-il dit, ajoutant
: "A cause de cette déclaration (du ministère
français, NDLR), nous rentrons en Libye".
"Nous en avons informé les familles des victimes
avec qui nos négociations se sont déroulées
dans un bon climat", a-t-il ajouté.
"Les propositions actuelles", formulées avant
que les négociateurs libyens ne suspendent les discussions,
"ne sont pas conformes aux souhaits exprimés par la
majorité des familles des victimes du DC 10", a réagi
Françoise Rudetzki, présidente de SOS Attentats,
qui a participé côté français aux discussions
avec les négociateurs libyens, quatre représentats
de la Fondation Khadafi.
Elle a ajouté que son organisation restait "totalement
ouverte à une reprise des discussions avec la délégation
libyenne sur des bases saines, transparentes et appropriées".
L'attentat contre le DC-10 d'UTA avait fait 170 morts de 17 nationalités,
dont 54 Français, au-dessus du désert du Ténéré
(Niger).
L'accord du 11 septembre, qui avait permis au Conseil de sécurité
de l'Onu, de lever les sanctions internationales pesant contre
Tripoli, est l'objet d'interprétations très différentes
de la part de la Libye et des familles françaises.
Washington et Londres avaient auparavant obtenu, en août,
un accord sur l'indemnisation des victimes de l'attentat de Lockerbie
qui avait fait 270 morts en 1988.
Le fils du dirigeant libyen, Seïf al-Islam, président
de la Fondation Kadhafi, l'organisme qui mène les négociations,
avait affirmé récemment à la presse que l'accord
prévoyait de "payer au maximum un million de dollars
par victime et (que) les Français l'ont accepté".
Pour les familles, en revanche, ce qui a été signé
le 11 septembre est un accord de principe prévoyant un
engagement à conclure les négociations d'indemnisation
dans un délai d'un mois.
Compliquant les discussions, Seïf al-Islam a fait état
lundi d'un accord en six points, conclu le même 11 septembre,
dont le contenu était "secret", mais que sa fondation
"se réservait le droit de publier au moment (...)
opportun".
Le Quai d'Orsay a démenti mardi ces affirmations. "Il
n'y a aucun accord secret de quelque type que ce soit, de quelque
nature que ce soit", a assuré son porte-parole, Hervé
Ladsous. "Nous avons toujours considéré que
cette affaire devait se régler dans la transparence la
plus totale entre les familles et la Fondation", a-t-il ajouté.
La délégation libyenne dirigée par M. Abdel
Salam, directeur de la Fondation Kadhafi, s'était rendue
lundi à Paris pour poursuivre les négociations.
Après que le président français Jacques
Chirac eut fermement rappelé samedi à la Libye ses
engagements, les contacts avaient repris in extremis, quelques
heures seulement avant l'expiration samedi à minuit d'un
délai d'un mois, fixé le 11 septembre, pour conclure
les négociations.
"J'ai vu un signe positif dans le fait que, à la
limite du temps imparti, les négociations ont été
reprises", avait dit M. Chirac dimanche.
"J'espère que ces négociations donneront un
résultat positif", avait-il poursuivi, ajoutant souhaiter
que "les engagements pris au plus haut niveau par la Libye
-s'agissant aussi bien du chef de l'Etat (Mouammar Kadhafi) que
du président de la Fondation Kadhafi- soient respectés". |