Par Sophie Louet
TUNIS (Reuters) - Jacques Chirac a annoncé
samedi que les négociations avaient repris avec la Libye
sur l'indemnisation des familles des victimes du DC-10 d'UTA,
et a mis en garde Tripoli contre des conséquences "négatives"
en cas de non-respect de ses engagements.
"Les contacts entre les représentants
des familles des victimes du vol UTA et les représentants
de la Fondation Kadhafi ont repris", a dit le président
français lors d'une conférence de presse à
l'issue du sommet euro-méditerranéen "5+5"
à Tunis.
"C'est toujours très compliqué
les relations avec la Libye, je le dis sans agressivité.
Nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet depuis deux
jours", a-t-il ajouté.
Les contacts ont été renoués
jeudi à Tunis, en marge du sommet "5+5", entre
les délégations libyenne et française, a-t-on
indiqué dans l'entourage de Jacques Chirac. Le président
français et le colonel Kadhafi n'ont pas eu d'échange
à ce sujet, a-t-on ajouté.
Le forum "5+5", lancé en 1991,
réunit cinq Etats du sud de l'Europe (Portugal, Espagne,
France, Italie, Malte) et les cinq Etats membres de l'Union du
Maghreb arabe (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Mauritanie).
Les négociations sur l'indemnisation des
proches des 170 victimes - de 17 nationalités différentes
dont 54 françaises - de l'attentat de septembre 1989 contre
le DC-10 d'UTA avaient été suspendues à la
mi-octobre. Les familles avaient lancé cette semaine un
appel au président français pour qu'il favorise
leur reprise.
"Honnêtement, j'avais imaginé
qu'à l'occasion de cette reprise une solution pourrait
intervenir. Pour le moment, elle n'est pas intervenue, et le règlement
définitif de cette douloureuse question n'est pas fait.
Croyez-bien que je le regrette", a dit Jacques Chirac.
"Les engagements pris il y a déjà
un certain temps - au plus haut niveau de l'Etat libyen - doivent
être tenus.
A défaut, nous devrions en tirer toutes
les conclusions", a prévenu Jacques Chirac.
"Cela pourrait avoir certainement et malheureusement
un effet négatif sur la relance de nos relations bilatérales
et sur la pleine réintégration de la Libye dans
la communauté internationale", a-t-il précisé.
"APURER LE PASSE"
Lors de sa visite d'Etat au Maroc, le 11 octobre,
Jacques Chirac avait déjà prévenu que la
France tirerait "sans agressivité" mais "sans
faiblesse" les conséquences d'un échec des
négociations.
La Libye est toujours sous le coup d'un embargo
militaire européen sur les "matériels sensibles"
(radars...) et de restrictions à la circulation des personnes.
Le président de la Commission européenne,
Romano Prodi, a déclaré vendredi au colonel Kadhafi
que l'Europe "tendait la main" à la Libye afin
"d'apurer le passé".
"Je suis tout à fait désireux
de voir la Libye réintégrer la communauté
internationale et nous sommes particulièrement attachés
à retrouver avec la Libye des relations normales",
a confirmé samedi Jacques Chirac.
Le président français, qui n'a
pas adressé la parole au dirigeant libyen durant le sommet
de Tunis, avait appelé de ses voeux vendredi "une
relation pleine et confiante" avec la Libye.
Un accord de principe a été conclu
en septembre entre les familles des victimes de l'attentat du
DC-10 et la fondation Kadhafi, dirigée par l'un des fils
de Mouammar Kadhafi, Seïf al-Islam Kadhafi.
Ce dernier accuse depuis lors Paris d'avoir renié
ses engagements, évoquant un document confidentiel signé
entre Tripoli et les autorités françaises, également
en septembre.
Il affirme que les négociations ne pourront
reprendre tant que la France refusera notamment de discuter de
contreparties financières pour la mort de trois aviateurs
libyens tués par l'armée française dans les
années 80 au Tchad.
Les négociations dans le dossier du DC-10
d'UTA ont été relancées au mois d'août
après le versement par Tripoli de 2,7 milliards de dollars
aux familles des 270 victimes de l'attentat contre un Boeing de
la Panam en décembre 1988 au-dessus de Lockerbie, en Ecosse.
Cette percée a conduit l'Onu à lever ses sanctions
contre Tripoli en septembre.
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