victimes attentat

(mardi 27 avril 2004, 13h25)

Visite à l'américaine pour Kadhafi à Bruxelles


BRUXELLES (Reuters) - Le colonel Mouammar Kadhafi a été accueilli mardi à Bruxelles avec un luxe de sécurité digne d'un président des Etats-Unis, ce qui n'a pas empêché un intrus de s'approcher à quelques centimètres du guide libyen.

Portant oreillette et badge, cet homme s'est mêlé aux gardes du corps qui s'engouffraient dans la plus grande confusion dans les locaux de la Commission, a plongé la main dans la poche intérieure de son veston pour en sortir ... une lettre.

Imperturbable, Kadhafi, qui sort définitivement de son isolement diplomatique lors de cette première visite en Europe depuis 1989, a continué à serrer pour les photographes la main du président de la Commission, Romano Prodi.

Les services belges de sécurité, qui craignaient visiblement un attentat, se sont alors emparés de l'intrus, qui a eu le temps de jeter sa lettre vers les deux personnalités.

L'homme, qui a crié "Kadhafi! Kadhafi!" en étant emmené par la police, s'est présenté comme étant Khalid al-Moutaani, dirigeant d'un comité de soutien aux enfants immigrés.

Il a dit être un admirateur du colonel Kadhafi.

"Je souhaite que la Libye et tout le monde arabo-africain puissent bénéficier que l'ouverture que l'Europe offre à Kadhafi," a-t-il déclaré à Reuters.

Cet incident est en contradiction totale avec le luxe de sécurité déployé pour la première visite du colonel libyen au siège de l'Union européenne, où il devrait demander l'adhésion de son pays au partenariat euro-méditerranéen.

Encadré par un groupe de sa fameuse garde prétorienne de jeunes femmes vêtues d'un uniforme militaire bleu très seyant et d'une casquette de base-ball, il a été accueilli par Romano Prodi en personne sur le tarmac de l'aéroport de Bruxelles.

"UN TERRORISTE"

Le président de la Commission, qui plaide depuis 1999 pour un rapprochement avec la Libye, a donné une chaleureuse accolade à Kadhafi, vêtu d'une tunique brune et d'une chéchia noire.

Le guide de la révolution s'est alors engouffré dans une Mercedes blanche allongée dotée d'une antenne satellite, qui a pris place dans un convoi comptant 12 autres véhicules.

Son arrivée au Breydel, le siège de la Commission européenne, s'est déroulé dans une cohue indescriptible et sous les cris de quelques centaines de supporteurs.

Quelques dizaines de mètres plus loin, des opposants, essentiellement des Libyens vivant en exil en Allemagne ou en Suisse, manifestaient leur colère de voir l'ex-paria de la communauté internationale revenir en grâce.

"Kadhafi est un assassin," pouvait-on lire sur une banderole. "Kadhafi est un loup déguisé en agneau."

"Pourquoi l'Union européenne reçoit-elle Kadhafi aujourd'hui?", a demandé Elghariany Elshares, un avocat vivant en Allemagne. "C'est un terroriste. Il m'a fait du mal, ainsi qu'à ma famille et à mes amis quand je vivais là-bas."

La visite historique - la première de Kadhafi en Europe depuis 1989 - couronne les efforts de la Libye pour se réinsérer dans le concert des nations, après les accords conclus par Tripoli pour verser des indemnités aux familles des victimes des attentats de Lockerbie et contre un avion d'UTA, et après l'annonce, à la fin de l'an dernier, du renoncement du régime libyen à tout programme d'armes de destruction massive.

Après la Commission, le dirigeant libyen devait rencontrer le Premier ministre Guy Verhofstadt, dont le gouvernement a fait ériger une tente dans les jardins du château de Val Duchesse, où sont hébergés les hôtes de marque du Royaume.

En Libye, le colonel loge sous la tente, comme les Bédouins qui peuplent encore son désert.

 

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