TRIPOLI (AFP) - La Libye a signé vendredi l'accord définitif
d'indemnisation des victimes de l'attentat contre la discothèque
berlinoise La Belle en 1986, cherchant à effacer l'image
d'"Etat voyou" qui a été la sienne pendant
plus de vingt ans, afin de promouvoir sa nouvelle politique
d'ouverture.
L'attentat contre la discothèque La Belle avait été
attribué partiellement par la justice allemande aux services
secrets libyens.
La Fondation Kadhafi, créée pour régler
les contentieux internationaux impliquant la Libye, et gérée
par le fils du dirigeant libyen, Seif al-Islam, s'était
engagée à verser 35 millions de dollars (28 millions
d'euros) à 168 victimes, essentiellement des Allemands.
Le règlement définitif de ce dernier contentieux
concernant des attentats attribués à des agents
des services secrets libyens, doit ouvrir la voie à une
visite à Tripoli à l'automne, du chancelier Gerhard
Schroeder.
Elle devrait lever aussi le dernier obstacle devant une visite
en Libye du président français Jacques Chirac,
qui avait, par solidarité avec Berlin, conditionné
son déplacement au règlement du contentieux germano-libyen.
Ces deux visites, après celle du Premier ministre britannique
Tony Blair, fin mars, du Premier ministre italien Sylvio Berlusconi,
en août, et alors que Romano Prodi, président sortant
de la Commission européenne, vient d'assister au 35ème
anniversaire de la "Révolution du Fateh", le
1er septembre 1969, devraient marquer un nouveau pas dans la
réintégration de la Libye dans la communauté
internationale.
Le gouvernement allemand a déjà réintroduit
ses garanties d'exportation "Hermes" en faveur des
entreprises allemandes commerçant vers la Libye, estimant
qu'"il y a en Libye de bonnes opportunités de faire
des affaires pour les Allemands".
En avril 2003, la Libye avait reconnu sa responsabilité
civile dans l'attentat contre un Boeing qui a explosé
en vol au dessus de Lockerbie (Ecosse) en décembre 1988,
faisant 270 morts, et accepté de dédommager les
familles.
La fondation Kadhafi a aussi signé un accord avec la
France pour dédommager les victimes de l'attentat contre
le DC-10 d'UTA en 1989, qui avait fait 170 morts, en s'engageant
à verser 170 millions de dollars aux familles. Le dédommagement
des victimes de La Belle classent le dossier des attentats attribués
à Tripoli.
La Libye s'est engagée par ailleurs à faire "toute
la lumière" sur la disparition sur son sol, selon
ses partisans, il y a 26 ans, de l'imam Moussa Sadr, chef charismatique
de la communauté chiite libanaise, qui avait fondé
au début des années 1970 le "mouvement des
déshérités" Amal.
Le 2 août, le procureur général libanais
a ordonné la réouverture du dossier et demandé
de procéder à l'interrogatoire de toutes les personnes
qui pourraient être impliquées dans la mystérieuse
disparition.
La plainte déposée par les familles des disparus
vise nommément le colonel Kadhafi, l'ex-Premier ministre
libyen Abdel Salam Jalloud et l'ancien ambassadeur de Libye
au Liban Achour al-Fartass. Tripoli a constamment nié
sa responsabilité dans cette affaire et affirmé
que l'imam Sadr et ses deux compagnons avaient gagné
l'Italie à la fin de leur séjour en Libye en 1978.
La Libye, qui cherche avec obstination à regagner la
confiance de la communauté internationale, avait fait
un pas de géant en révélant en décembre
2003 son programme d'armes de destruction massive (ADM) et en
s'engageant à y renoncer, après des négociations
secrètes avec Washington et Londres.
Mais, l'Agence internationale de l'énergie atomique
(AIEA), qui a salué sa démarche, demande encore
à Tripoli d'éclaircir des "questions critiques"
concernant les sources étrangères et les intermédiaires,
qui avaient permis à la Libye d'acquérir des équipements
nucléaires sensibles, sans doute sur le marché
noir.
Deux ressortissants allemands, Gerhard W. et Gotthard L. sont
dans le collimateur de la justice allemande pour leur rôle
d'intermédiaire éventuel dans ces achats.