TRIPOLI (AFP) - 03/01/2005 11h49 - L'année
2004 aura été celle de tous les changements pour
la Libye, à la fois sur le plan politique avec son retour
en grâce sur la scène internationale et sur le
plan économique avec l'amorce de réformes qui
tranchent avec le dirigisme étatique.
Tout a commencé le 19 décembre 2003, lorsque,
à la grande surprise mondiale, Tripoli a révélé
son programme d'armes de destruction massive et s'est engagé
à y renoncer, après des négociations secrètes
avec Washington et Londres.
"Le monde a changé" a reconnu le numéro
un libyen Mouammar Kadhafi à l'occasion du 35e anniversaire
de son accession au pouvoir, le 1er septembre, pour expliquer
sa politique d'ouverture tous azimuts vers l'Occident, Etats-Unis
en tête.
"Nous nous sommes beaucoup insultés, mais en fin
de compte nous étions tous perdants", avait-il ajouté
pour justifier sa volonté d'effacer l'image d'"Etat
voyou" qui a été celle de Tripoli pendant
plus de vingt ans.
Désormais, officiels et médias libyens répètent
à l'envi que dans ce monde, il "n'existe pas d'amitié
éternelle, ni d'hostilité éternelle, il
n'y a que les intérêts" économiques
qui comptent.
L'un après l'autre, la libye a réglé ses
conflits avec les pays occidentaux. La fondation Kadhafi, dirigée
par Saif al-Islam le fils aîné du dirigeant libyen
a été le maître d'oeuvre de ces règlements,
d'un prix de plusieurs milliards de dollars pour Tripoli.
Elle a signé un accord avec la France pour dédommager
les victimes de l'attentat contre le DC-10 d'UTA en 1989 (170
morts), en s'engageant à verser 170 millions de dollars
aux familles.
Elle s'est aussi mise d'accord avec l'Allemagne pour verser
35 millions de dollars de dédommagements pour l'attentat
contre la discothèque berlinoise La Belle en 1986 (3
morts et 260 blessés).
Déjà en 2003, la Libye avait accepté le
paiement de 2,7 milliards de dollars aux familles des victimes
de l'attentat de Lockerbie (Ecosse) en décembre 1988
(270 morts).
Tripoli et Washington ont renoué en juin 2004 leurs
relations diplomatiques après une rupture de 24 ans et
depuis, officiels et parlementaires américains se succèdent
depuis chez le "chef de la révolution libyenne",
qui a tant décrié "l'impérialisme
américain".
Les Européens qui ont levé en octobre les sanctions
à l'encontre de la Libye, sont venus en nombre à
Tripoli, notamment le Britannique Tony Blair, l'Italien Silvio
Berlusconi et l'Allemand Gerhard Schroeder.
Le président français Jacques Chirac a été
le dernier haut dirigeant européen à sceller la
réconciliation entre son pays et la Libye. Il a indiqué
que l'objectif de son voyage était d'établir un
"vrai partenariat" politique et économique
avec Tripoli
La "Nouvelle Libye" entend faire du pétrole, sa
principale ressource, le coeur de son ouverture économique.
Elle compte à cet effet associer le maximum de compagnies
internationales à son exploitation.
Selon son Premier ministre Choukri Ghanem, économiste
formé aux Etats-Unis et ancien ministre du Pétrole,
Tripoli, membre de l'Opep, a pour ambition de doubler sa production
pour atteindre 3 millions de barils par jour en 2010.
M. Ghanem qui a reçu carte blanche pour rouvrir le pays
aux investisseurs étrangers et démanteler l'économie
administrée, source de corruption et de gaspillage, estime
que l'investissement nécessaire pour atteindre cet objectif
tournerait autour de 30 mds USD.
Les compagnies américaines sont sur les rangs, mais
elles ne sont pas les seules. Les groupes pétroliers
français, italiens et espagnols (Total, Agip et Repsol),
et canadiens, ne veulent pas laisser passer l'occasion de se
renforcer dans l'exploration du sous-sol libyen.
En 2004, Tripoli s'attend à encaisser un pactole de
quelque 15 milliards de dollars de ses exportations pétrolières,
en raison de la flambée des prix du brut.
Sur un autre plan, la Libye doit relever le défi de
lutter contre le phénomène de l'immigration clandestine
qui inquiète notamment les dirigeants italiens, pour
rétablir entièrement les ponts avec l'Europe.