Ils revendiquent à
la Libye le remboursement des sommes liées au dédommagement
des ayant-droits des trois victimes camerounaises de l’explosion
d’un aéronef au-dessus du désert du Ténéré
le 19 septembre 1989.
“L’explosion d’un aéronef DC 10 de
la compagnie Uta, ralliant Brazzaville à Paris, au-dessus
du désert du Ténéré au Niger, est
loin d’être une affaire classée. Le dernier
rebondissement en date le prouve assez. En effet, à la
requête conjointe du Gie “ La Réunion Aérienne
” et l’ensemble des co-assureurs, représentés
au Cameroun par Maître Maurice Nkouendjin – Yotnda
(avocat au Barreau du Cameroun), une assignation en dédommagement
vient d’être servie à la Jamahiriya libyenne
à travers son ambassade du Cameroun.
Au cours de l’audience du 25 mai prochain et par-devant
le Tribunal de Grande instance de Yaoundé, statuant en
matière civile et commerciale au Palais de justice de
Yaoundé, la partie plaignante entend en effet obtenir
de l’Etat libyen (responsable reconnu de l’explosion
du DC 10 de l’Uta) le remboursement de la somme de 190.263.948
Fcfa versée aux ayant-droits des trois victimes camerounaise
qui ont péri à la suite de l’explosion sus
– mentionnée. Outre ce montant, les plaignants
revendiquent le versement de “ toutes ces sommes au principal,
avec intérêts capitalisés au jour du paiement,
ainsi que les frais de procédures, de conseils, et autres
accessoires ; ceci sans préjudice d’autres sommes
qui pourraient lui être dues consécutivement à
l’explosion de l’aéronef dont il s’agit
”.
Les autres pays africains
L’action judiciaire engagée au Cameroun par les
assureurs français est appelée à s’étendre
dans les six autres pays africains dont les ressortissants ont
disparu dans l’explosion du DC10 de l’Uta. Me Maurice
Nkouendjin – Yotnda assurera la coordination de la procédure
dans l’ensemble des pays concernés : le Cameroun,
la République Centrafricaine, le Congo Brazzaville, le
Congo Démocratique, le Tchad, le Mali et le Sénégal.
Sa mission, explique-t-il, consiste à prendre langue
– dans chaque pays concerné – avec toutes
les parties prenantes à l’action judiciaire à
engager, en l’occurrence les familles ou les associations
de victimes et les avocats chargés du dossier. Le célèbre
avocat prendra par ailleurs part à toutes les plaidoiries.
“ C’est une occasion qui donne l’opportunité
aux Africains de se prendre eux-mêmes en charge. Il faut
que les Africains apprennent à se battre eux-mêmes.
Nos clients ont refusé cette fois –ci d’engager
la procédure judiciaire à partir de Paris ”,
martèle l’avocat. Et de conclure : “ ce dossier
met les africains face à leurs responsabilités.
La procédure judiciaire est engagée en Afrique
par des africains. Elle met aux prises des Africains contre
un chantre de l’Union africaine ”.
Plus que jamais, les regards sont tournés vers le Colonel
Muammar Kadhafi. Après avoir consenti au décaissement
de substantielles sommes d’argent pour les dommages et
intérêts en faveur des ayant-droits des victimes,
acceptera-t-il une fois de plus d’éponger l’ardoise
des assureurs ? La réponse à cette question et
la décision de la justice détermineront la suite
de l’affaire. Toutefois, deux hypothèses se présentent.
Primo : l’acceptation par le leader libyen de payer la
note des assureurs. Auquel cas, chaque ayant-droit percevra
la rondelette somme d’un million de dollar offerte par
la Libye.
Secundo : la Libye refuse de s’exécuter, avec ou
sans la bénédiction de la justice. Dans ce cas,
les assureurs engageront une seconde procédure judiciaire
en France pour être remboursés à partir
des fonds (pour les ayant-droits) déposés par
la Libye à la Cour d’Assises de Paris.
La Jamahiriya Arabe Libyenne Populaire est par ailleurs confrontée
à l’action judiciaire en France au sujet du remboursement
des sommes versées par les assureurs aux ayant-droits
français dans l’explosion du DC 10 de l’Uta.
Repères
Pour mémoire, l’explosion du DC 10 de l’Uta
a fait 170 morts, parmi lesquels 101 africains. Une information
judiciaire a été ouverte au Tribunal de Grande
instance de Paris. A l’issue de l’information judiciaire,
la Cour d’Appel de Paris a prononcé le 12 juin
1998 la mise en accusation d’Ahmed Abdallah Elazragh,
Abdallah Senoussi, Abdelsalam Hammouda El Ageli, Abdelsalam
Issa Shibani, Ibrahim Naeli et Arbas Musbah. La Cour d’Assises
de Paris spécialement composée les a, par arrêts
du 10 mars 1999, reconnus coupables de complicité de
la destruction volontaire de l’aéronef par effet
d’une substance explosive, avec cette circonstance que
cette destruction a entraîné la mort de 170 personnes.
Les accusés ont été condamnés par
contumace à la réclusion criminelle. En application
des polices d’assurance souscrites par la compagnie Uta,
le Gie La Réunion Aérienne, en sa qualité
d’apériteur a versé entre autres, la somme
globale de 14.890.211 euros aux ayant-droits des victimes de
l’aéronef. La Libye, par la voie de son leader,
s’était engagée à s’acquitter
de ses obligations au cas où des citoyens libyens étaient
coupables dans cette affaire, si toutes les conditions requises
par la loi étaient remplies.
Par Thierry Ndong
Le 07-03-2005