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(mercredi 1er juin 2005)

Les nurses qui embarrassent la Libye


Accusés d'avoir inoculé le sida à des enfants, cinq infirmières bulgares et un médecin palestinien ont vu leur pourvoi repoussé.

Par Christophe BOLTANSKI
mercredi 01 juin 2005

Tripoli envoyé spécial

Signe de son embarras, la Libye a choisi de prendre tout son temps dans une affaire qui gâte ses retrouvailles avec la communauté internationale. La Haute Cour de Tripoli devait enfin se prononcer sur le pourvoi déposé par les cinq infirmières bulgares et le médecin palestinien condamnés à mort en mai 2004 pour avoir «sciemment» inoculé le sida à 400 enfants. Fin mars, sa décision, très attendue, avait déjà été reportée. Hier matin, son président, Ali el-Allous, a annoncé qu'il se donnait un délai de réflexion supplémentaire jusqu'au 15 novembre.

Déception. A la sortie, les représentants de l'Europe, des Etats-Unis et du Canada, qui remplissaient presque à eux seuls le prétoire, ne cachaient pas leur déception. «Cela signifie cinq mois d'agonie supplémentaire pour nos infirmières», s'est écrié l'ambassadeur de Bulgarie. Ce sursis a également provoqué la colère des familles des victimes, qui, massées derrière les grilles du tribunal, criaient vengeance.

Les cinq infirmières et le médecin travaillaient dans un hôpital pédiatrique de Benghazi. En février 1999, après la découverte d'une épidémie de sida, ils ont été arrêtés et accusés d'avoir transfusé du sang contaminé à leurs jeunes patients. Ceux qui ont reconnu les faits pendant l'instruction affirment que leurs aveux ont été arrachés sous la torture. Au début, les autorités dénonçaient un complot ourdi par «la CIA et le Mossad». Une thèse aujourd'hui oubliée.

Sur les 400 enfants testés positifs, 51 sont déjà décédés. Une enquête conduite à la demande des autorités libyennes par le professeur français Luc Montagnier, codécouvreur du virus, et l'Italien Vittorio Colizzi, a conclu à une infection «accidentelle» due à une mauvaise hygiène. Mais les juges n'ont retenu qu'un rapport d'experts libyens qui confirmait la culpabilité des prévenus.

Solution négociée. La semaine dernière, la commissaire européenne aux Relations extérieures et le président bulgare sont venus plaider la cause des prisonniers auprès de Kadhafi. Les autorités libyennes répètent qu'elles ne peuvent «s'ingérer dans une décision de justice», mais n'excluent pas une «solution négociée» avec les familles des enfants. Une somme équivalente à celle versées aux victimes de Lockerbie a été évoquée.

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