Dix policiers acquittés dans l'affaire des infirmières
bulgares.
Par Christophe BOLTANSKI
mercredi 08 juin 2005
C'est un nouveau coup dur pour les cinq infirmières
bulgares et le médecin palestinien détenus par
la Libye à cause d'une épidémie de sida
(Libération du 2 juin). Condamnés à
mort pour avoir inoculé sciemment le virus à 430
enfants, ils affirment que leurs aveux ont été
arrachés sous la torture. Hier, les dix policiers libyens
qu'ils avaient traînés en justice ont tous été
acquittés par un tribunal de Tripoli.
«Il n'y a pas de torture
en Libye !», s'est écrié
l'officier Jomaa al-Mechti à l'annonce de la sentence.
«Vive la justice !», ont renchéri
les proches des prévenus. Deux d'entre eux avaient pourtant
admis devant un procureur avoir exercé des sévices
sur leurs prisonniers, mais s'étaient rétractés
lors du procès.
Les infirmières et le médecin étaient
employés dans un hôpital pédiatrique de
Benghazi lorsqu'une violente épidémie de sida
s'était déclarée. Cinquante enfants sont
décédés depuis. Une enquête conduite
par des experts étrangers, dont le professeur Luc Montagnier,
codécouvreur du virus, avait conclu à une contamination
«accidentelle», due à une mauvaise
hygiène. Accusés d'avoir infecté leurs
jeunes patients, ces coopérants étrangers avaient
été arrêtés, roués de coups
pendant des semaines, menacés avec des chiens.
Les Européens, Bulgares en tête, dénoncent
une parodie de justice et exigent leur libération immédiate.
En parallèle à ces efforts diplomatiques, l'action
intentée contre les policiers pouvait laisser espérer
une issue judiciaire à la crise. Si les officiers avaient
été reconnus coupables de mauvais traitements,
les cinq Bulgares et le Palestinien auraient pu exiger la révision
de leur procès. La Cour suprême libyenne doit examiner
le 15 novembre leur pourvoi en cassation.
Comme si la Libye cherchait une porte de sortie, elle les avait
autorisés en janvier à prendre comme défenseur,
pour cette seconde affaire, un membre d'Avocats sans frontières-France,
Me Emmanuel Altit. «Après m'avoir permis de
plaider, ils m'ont empêché de rencontrer mes clientes
et d'accéder au dossier. Les droits de la défense
ont été complètement bafoués»,
expliquait-il hier. Il devrait cependant continuer à
jouer cet étrange jeu judiciaire et faire appel de la
décision.