Hier, La Fondation chargée d'indemniser les familles
des victimes de l'attentat contre le DC10 d'UTA, qui avait explosé
le 19 septembre 1989 au-dessus du Niger, tuant 170 personnes,
a annoncé que son action touchait à sa fin.
À la tête de la Fondation, Daniel Labetoulle,
ancien membre du Conseil d'État.
« Nous songeons à organiser notre disparition.
Notre action est pratiquement terminée.» C'est
en ces termes que Daniel Labetoulle a présenté
hier le bilan de la Fondation. En 2004, cinq ans après
la condamnation, par contumace, de six Libyens responsables
de l'attentat contre le DC10 d'UTA en 1989 au-dessus du Niger,
les parties libyennes et françaises étaient parvenues
à un accord de réparation: les familles des victimes
s'engageant à ne pas poursuivre l'État libyen
recevraient un million de dollars (0,74milliond'euros) par victime,
de la part d'une « Fondation internationale Kadhafi pour
les associations charitables » créée pour
l'occasion. Mais comment réparatrices 170 millions de
dollars (134,5 millions d'euros) en toute équité
? Pour mener cette tâche, il fallait quelqu'un qui soit
à La fois rigoureux et humain. «J'ai choisi Daniel
Labetoulle, explique Olivier Grémont, directeur adjoint
de la Caisse des Dépôts, parce que ce président
de la section du contentieux au Conseil d'État était
connu autant pour sa compétence technique que pour son
humanité, son honnêteté, son éthique.»
«Nous avions besoin d'une autorité morale pour
cette mission très délicate, aux frontières
de la diplomatie, du droit et des relations humaines»,
renchérit Francis Grégoire, directeur des études
de la Caisse des dépôts.
La fondation a dû, en effet, définir des règles
de répartition qui ne spolient personne et apaisent un
peu la douleur de chacun. Pas question de reprendre tel quel
le droit successoral français ou celui des pays africains
concernés. En dialoguant avec les familles, le conseil
d'administration de la fondation - où les associations
de victimes sont représentées - a établi
une hiérarchie des ayants droit: le fils de la victime
reçoit une plus grande part que le frère, qui
lui-même obtient plus que le demi-frère, etc. «Daniel
Labetoulle a protégé particulièrement les
conjoints et les mineurs, dont certains risquaient d'être
spoliés par des proches, », souligne Emmanuelle
de Saint-Marc, dont le beau-père est mort dans l'attentat.
Elle sourit en ajoutant : « Il est, réellement,
le défenseur de la veuve et de l'orphelin. »
Aujourd'hui, plus de 95 % des fonds ont été versés
à 1 250 ayant droit dans 17 pays. Le reste, qui concerne
une centaine de personnes, surtout en Afrique, est bloqué
par l'absence de documents d'état civil ou par des procédures
judiciaires entre personnes revendiquant des liens avec les
victimes.
La fondation ne pourra se saborder que lorsque ces litiges auront
été réglés, note Daniel Labetoulle,
visiblement satisfait d'avoir presque achevé sa mission
et d'avoir réussi, avec une «gestion économe»,
à autofinancer la fondation avec les intérêts
des 170 millions.
FRÉDÉRIC NIEL