victimes attentat

(jeudi 7 mars 2002)

Kadhafi junior
Au nom du père

par Vincent Hugeux

La visite en France de Seif al-Islam, fils du Guide de la révolution, témoigne du souci de Tripoli de normaliser ses relations avec l'Occident

Son prénom signifie «Glaive de l'islam». A 30 ans à peine, Seif al-Islam Kadhafi, fils premier-né du second mariage du Guide de la révolution libyenne, parfait son apprentissage de bretteur. Mais son séjour en France, du 25 février au 2 mars, enrichit aussi l'offensive de charme d'un pays paria en quête de respectabilité ou d'investissements, et qui fête le quart de siècle de la Jamahiriya - l'Etat des masses - «arabe, populaire et socialiste». Escorté par une suite pléthorique, cornaqué par le cousin Ahmad Kadhaf al-Dam, naguère chef des services de renseignement de Tripoli, l'hôte eut droit lors de cette «visite privée» aux égards dus à un dauphin prometteur. «Il a de l'avenir, de l'influence et les faveurs de son père», avance un éminent orientaliste du Quai d'Orsay. De fait, Seif al-Islam, noceur assagi, insiste trop sur son absence de mandat officiel pour qu'on le croie tout à fait. Qu'il s'agisse du Proche-Orient, du naufrage de l'idéal panarabe ou de l'Union africaine - vieux dada paternel - ses thèses font écho, sur un registre policé, aux imprécations du «bouillant colonel». La Fondation internationale Kadhafi de bienfaisance, qu'il préside, joua un rôle décisif dans la libération des otages occidentaux détenus à Jolo par les rebelles islamistes philippins. De même, l'héritier a négocié au Pakistan le rapatriement de 40 moudjahidine libyens arrêtés en Afghanistan. Et il propose aux maîtres de Kaboul d'accueillir sur le rivage des Syrtes les soldats perdus d'Al-Qaeda.

L'escapade parisienne aura eu, pour lui, une saveur de revanche: désireux de poursuivre, fût-ce de loin, ses études dans l'Hexagone, Seif sollicita en vain un visa. Voilà comment, flanqué d'un couple de tigres du Bengale, l'éconduit débarque un jour à Vienne et se lie avec le populiste autrichien Jörg Haider, autre réprouvé. A l'en croire, du sang arabe coule d'ailleurs dans les veines du bellâtre xénophobe; lequel envisagerait d'embrasser l'islam... Epris de business, «le Glaive» goûte aussi l'art pictural. L'Institut du monde arabe (IMA) présente ces jours-ci ses tableaux, à la faveur d'une exposition parrainée par une dizaine de groupes pétroliers engagés en Libye. Un hommage avisé à la peinture à l'huile?

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