victimes attentat

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(Mardi 30 avril 2003, 10h31)

LE CAIRE (AFP) - Terrorisme: Tripoli lâche du lest sur Lockerbie

La Libye a annoncé avoir accepté de prendre sa responsabilité civile dans l'attentat de Lockerbie, dans l'espoir d'obtenir une levée des sanctions, une position qualifiée de réaliste par des analystes.

Tripoli a admis pour la première fois mardi, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Abdel Rahmane Chalgham sa responsabilité civile "pour les actions de ses fonctionnaires dans l'affaire de Lockerbie". "La Libye a opté pour une approche politique plus réaliste, dictée par les développements dans les rapports de force sur la scène internationale", a affirmé le rédacteur en chef du magazine gouvernemental égyptien Al-Moussawar, Makram Mohamed Ahmed.

Le chef de la diplomatie libyenne, a affirmé espérer un dédommagement rapide des familles des 270 victimes de l'attentat, survenu en décembre 1988. Ce dédommagement est estimé à 2,7 milliards de dollars à raison de 10 millions de dollars par famille. Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont cependant affirmé ne pas avoir de confirmation officielle. "Nous avons vu des informations de presse, mais n'avons rien entendu de la part du gouvernement libyen", a déclaré une porte-parole du département d'Etat, Lynn Cassel. Londres n'a pas reçu de confirmation officielle mais "saluerait l'application par la Libye des résolutions de l'Onu", a déclaré pour sa part une porte-parole du Foreign Office.

Depuis 1988, la Libye avait catégoriquement refusé cette proposition. Le 12 mars, elle était cependant parvenue à un accord avec les Américains et les Britanniques, stipulant qu'elle prenne une part de responsabilité dans l'attentat. "C'est une tentative de la part de la Libye d'accorder sa situation politique aux changements internationaux et d'éviter toute confrontation avec les Etats-Unis", a ajouté M. Ahmed, proche du président égyptien Hosni Moubarak. Il n'écarte pas que M. Moubarak ait "conseillé" au dirigeant libyen Mouammar Kadhafi d'admettre les "nouvelles donnes" dans la politique internationale, dont la guerre contre l'Irak est la démonstration la plus récente et la plus flagrante.

Le renversement par la force du régime de Saddam Hussein est intervenu à peine plus d'une année après l'offensive américaine qui a éliminé le régime des taliban en Afghanistan, accusé de soutenir le réseau terroriste d'al-Quaïda, responsable des attentats du 11 septembre. Les Etats-Unis se montrent également extrêmement critiques envers leur plus fidèle allié dans la région, l'Arabie saoudite, depuis qu'il s'est révélé que 15 sur 19 des auteurs de l'attentat du World Trade Center étaient originaires de ce pays.

Washington a également proféré des menaces en avril contre la Syrie, qu'elle accuse de soutenir le terrorisme et d'offrir refuge aux dirigeants irakiens en fuite. "Tout porte à croire que Tripoli veut éviter une confrontation", estime M. Ahmed. Au fur et à mesure du règlement des dédommagements, qui se fera en trois étapes, la Libye veut obtenir en contrepartie que les sanctions qui lui sont imposées par l'Onu soient levées immédiatement après le premier paiement, et que les sanctions américaines soient levées après le deuxième paiement. Après le troisième paiement, Tripoli exigera d'être effacée de la liste américaine des pays soutenant le terrorisme.

Interrogé en février 2001, s'il pourrait accepter de verser les indemnités aux familles des victimes contre la levée des sanctions, le colonel Kadhafi avait catégoriquement refusé, affirmant que la Libye "n'avait pas à accepter des compromis ou faire des concessions". "Il reste à savoir si la nouvelle position libyenne permettra de fermer le dossier, ou si, au contraire, elle servira de prétexte pour créer un nouveau problème et lancer d'autres chantages pour faire pression sur Tripoli pour en extorquer davantage de concessions", s'interroge M. Ahmed.

"Avec la présence des faucons à Washington, tout laisse à croire que la victoire des Américains en Irak aiguisera leur appétit pour d'autres victoires et les poussera à davantage de durcissement envers ces régimes qu'ils estiment être des +régimes voyous+", affirme-t-il.

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