victimes attentat

(Mercredi 6 octobre 2004, 17h20)

Barnier à Tripoli


La visite de Michel Barnier en Libye constitue la première visite officielle d’un chef de la diplomatie française depuis celle effectuée par Dominique de Villepin en octobre 2002. Elle devrait être «l’occasion d’approfondir, avec les autorités libyennes, notre dialogue politique», a fait savoir le ministre des Affaires étrangères français.


Cette visite devrait permettre «d’évoquer le processus de rapprochement de la Libye avec l’Union européenne», a précisé le ministère. En effet, le contentieux est lourd et la reprise des relations ne se fait qu’à petits pas, mais la Libye tend toutefois à normaliser ses relations envers la communauté internationale. Elle a entamé l’an dernier une politique de réconciliation avec l’Occident en versant 2,7 milliards de dollars aux familles des victimes de l’explosion d’un Boeing de la Pan Am -qui s’était écrasé, en 1988, à Lockberbie en Ecosse (270 morts). Par ailleurs, le 10 août dernier, la Fondation Kadhafi et l’Allemagne étaient parvenues à une négociation concernant le dédommagement des victimes non-américaines de l’attentat, en avril 1986, de la discothèque «la Belle» (3 morts, 260 blessés), un attentat que la justice allemande avait accusé l’Etat libyen et ses services secrets d’avoir planifié à partir de l’ambassade libyenne à Berlin-Est.

Sur le plan bilatéral, le coup d’envoi de cette relance est intervenu en janvier dernier, quand Tripoli s’est engagé à verser 170 millions de dollars aux familles des victimes de l’attentat contre le DC10 d’UTA survenu en 1989 (170 morts). Ce réchauffement diplomatique s’est poursuivi, en avril 2004, avec la visite officielle en France du Premier ministre libyen, Choukri Ghanem. Lors de cette visite, la France et la Libye ont signé des accords économiques pour aplanir le terrain en faveur des entreprises pétrolières ou aéronautiques, au moment même où toute la communauté internationale commence à se presser au portillon libyen, avide de ses richesses et impatiente de décrocher ses commandes.

Mise au ban de la scène internationale pendant plus de dix ans, la Libye s’était vu imposer un embargo aérien, un embargo sur les armes et des mesures pesant sur son industrie pétrolière. Mais le processus du retour de la Libye dans la communauté des nations a progressé en décembre 2003 lorsque Tripoli a déclaré renoncer à toute arme de destruction massive. Dans les prochaines semaines, les dernières sanctions de l’Union européenne devraient être levées, notamment concernant l’interdiction de livraisons d’armes.

Une politique de réconciliation avec l’Occident

A l’instar de Tony Blair, le Premier ministre britannique qui s’était rendu en mars dernier en Libye pour sceller une réconciliation avec l’ex-«Etat-voyou» et signer des contrats, Michel Barnier rend visite à son homologue Abdel-Ramane Chalkham et au Premier ministre Choukri Ghanem, entendant bien consolider et «approfondir le dialogue politique» amorcé, autrement dit défendre sa place sur le marché: le pétrole représente toujours 96 % des importations françaises, et la société Total devrait finaliser un projet ambitieux de partenariat stratégique avec NOC, la compagnie nationale libyenne.

Le dossier de l’immigration clandestine devrait également être abordé à Tripoli, dans le cadre des relations entre l’Union européenne, l’Afrique et la Méditerranée. En effet, la Tunisie et la Libye s’avèrent être les principaux pays de départ des migrants clandestins. Pour mieux maîtriser l’afflux de ces candidats à l’exil en Europe, l’organisation internationale pour les migrations (OMI) propose de créer des centres de transit en dehors des frontières de l’Union européenne. Les immigrants y seraient informés, et leurs demandes soumises à étude. Tandis que l’Allemagne et l’Italie sont favorables à cette proposition, la France, s’appuyant sur l’expérience peu convaincante du centre de Sangatte, s’y oppose. Michel Barnier a souligné que la solution de fond «passe évidemment par l’approfondissement de la coopération entre Européens et Méditerranéens, l’approfondissement de la coopération notamment, visant à créer des projets créateurs d’emplois et donnant aux jeunes le sentiment que finalement ils peuvent rester chez eux et y trouver les moyens de vivre dignement comme ils peuvent légitimement l’espérer, mais la discussion se poursuit».


Dominique Raizon
Article publié le 06/10/2004
Dernière mise à jour le 06/10/2004 à 17:20 (heure de Paris)

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