victimes attentat

(Jeudi 5 janvier 2005)

Douste-Blazy rencontre en Libye les infirmières bulgares

Christophe de ROQUEFEUIL

Agence France-Presse

TRIPOLI

Le ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, a rencontré jeudi dans une prison proche de Tripoli des infirmières bulgares et le médecin palestinien accusés d'avoir inoculé le virus du sida à des enfants libyens.

L'une des infirmières, Kristiana Vulcheva, au bord des larmes, a profité de l'occasion pour lancer un appel: "Ne nous oubliez pas". "Nous savons très bien que nous sommes les otages d'un jeu politique, nous sommes exténuées", a-t-elle dit, assise à côté du ministre français dans une salle de la prison de Jdeida, dans la banlieue de Tripoli.

"Psychologiquement nous n'allons pas bien du tout", a-t-elle ajouté. Elle a indiqué que quatre seulement d'entre elles avaient pu assister à la rencontre, la cinquième étant malade et "à bout de forces".
Le médecin palestinien, Ahmed Ashraf al-Hadjudj, a déclaré de son côté : "Nous sommes innocents tout comme les enfants contaminés". "Nous sommes aussi des victimes".

Cardiologue de formation, M. Douste-Blazy leur a exprimé "toute sa solidarité en tant que médecin" et "espéré que ce cauchemar touche à sa fin". "Je veux vous dire la solidarité de la France", leur a-t-il dit.

Les cinq infirmières bulgares et le médecin palestinien, incarcérés depuis 1999, ont été condamnés à mort le 6 mai 2004, accusés d'avoir inoculé le virus du sida à 426 enfants libyens, dont 51 sont morts. La Cour suprême libyenne vient toutefois de donner suite à un recours des six accusés en vue d'un nouveau procès.

M. Douste-Blazy a indiqué qu'il avait proposé aux autorités libyennes un plan français, s'inscrivant dans les efforts de l'Union européenne pour régler cette affaire. Il vise à permettre aux enfants libyens le plus gravement contaminés d'être soignés en France et à améliorer la formation du personnel et les équipements de l'hôpital de Benghazi (nord-est) où se sont produites les contaminations.

M. Douste-Blazy, qui avait rencontré plus tôt à Tripoli son homologue Abderrahmane Chalgham, s'est rendu dans l'après-midi à l'hôpital de Benghazi pour y rencontrer les enfants atteints du sida, des familles ainsi que le personnel médical.

"La France est décidée à tout faire pour atténuer les souffrances, celles des familles, celles des enfants et celles des infirmières bulgares et du médecin palestinien", a-t-il dit devant les représentants des familles.

Il a été accueilli par des habitants de Benghazi portant des banderoles sur lesquelles figuraient les portraits des enfants contaminés déjà décédés. On pouvait lire notamment, en anglais : "Victimes du crime du sida".

Le ministre a rencontré trois adolescents hospitalisés, auxquels il a dit être venu "faire des propositions en accord avec les médecins de Benghazi" pour qu'ils bénéficient "des meilleurs soins possibles".

Les murs de l'hôpital affichaient également des photos des enfants disparus.

M. Douste-Blazy a réaffirmé sa proposition qu'une partie des enfants nécessitant des soins particulièrement urgents puissent être hospitalisés en France, mais il a précisé que "tous les enfants n'avaient pas besoin des hôpitaux parisiens". Le but est aussi de faire de l'hôpital de Benghazi "un hôpital spécialisé dans le traitement de cette maladie", a-t-il expliqué.

Au cours d'une rencontre avec des membres des familles, un père a dit en leur nom qu'ils "appréciaient beaucoup l'attitude de la République française", tout en déplorant avoir été "pendant des années seuls avec nos enfants malades".

Le ministère bulgare des Affaires étrangères a exprimé jeudi sa gratitude pour "l'engagement actif" de la France dans cette affaire.

cr-ial/phv/ps

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